Séminaire | La mort, la perte, le deuil : perspectives anthropologiques
Séminaire | La mort, la perte, le deuil : perspectives anthropologiques
1 décembre 2021 Aucun commentaire sur Séminaire | La mort, la perte, le deuil : perspectives anthropologiquesSÉMINAIRE « La mort, la perte, le deuil : perspectives anthropologiques »
Jeudi 2 décembre 2021
16H – 20H
La prochaine séance du séminaire « La mort, la perte, le deuil : perspectives anthropologiques », organisé par Serena Bindi et associé à l’ANR PHANTASIES, se déroulera le jeudi 2 décembre. Elle proposera des interventions de Devin FLAHERTY (University of Texas – San Antonio) et de Brigitte STEAINMANN (Université de Lille, CLERSE ; CEH).
Programme de la séance
16h -18h | Devin FLAHERTY (Assistant Professor, Department of Anthropology, University of Texas – San Antonio) : Mourning in the World:Island Experiences of Loss, Home, and Place.
This talk traces the experiences of two women, each of whom lost a parent at the end of life on the island of St. Croix, U.S. Virgin Islands. One an island native who had been long absent, another a “continental” whose home supposedly lay elsewhere, I follow these women in the weeks after their loss to illuminate two alternate, but resonant, experiences of mourning in this small island place. I engage a phenomenological perspective to interrogate how loss, home, movement, isolation, time and place intertwined in the mourning experiences of these two women. Finally, I offer reflections on what these experiences might show us about mourning as world-changing and geographically attuned.
18h – 20h | Brigitte STEINMANN (Professeure émérite, Anthropologie sociale, Université de Lille, CLERSE ; CEH) : Rites funéraires ‘pour les vivants’, rites de levée de deuil ‘pour les morts’, exorcismes et bouc-émissaires : les traitements de l’infortune et de l’adversité par les populations bouddhistes du Népal.
Le couple « Eros et Thanatos », qu’on veuille le caractériser par l’opposition de la vie et de la mort, l’association des pulsions sexuelles aux pulsions de mort, ou encore de l’amour et du plaisir charnel en tant qu’opposés à la cadavérisation et la putréfaction, continue de traverser l’espace et le temps en Europe occidentale. Pour l’Asie orientale, en particulier le Népal, je me réfère en premier lieu aux traditions indiennes qui représentent le phallus du dieu Śiva érigé au dessus de la yoni, ou matrice de la déesse. Cet ensemble sculptural se présente en effet sous une infinie variété artistique, et symbolise les idées de création et de destruction, les pouvoirs de vie et de mort, associant dans une union quasi-organique les organes du dieu Śiva et de la déesse ou force primordiale (shakti). Je voudrais montrer comment, dans les danses tantriques tibétaines (’cham) et nombre de célébrations rituelles liées aux cycles de vie et de mort chez les populations indo-tibétaines du Népal, les énergies (et éventuellement les sentiments et les émotions) des hommes et des femmes, liées à la précarité de l’existence, à l’adversité, au malheur, mais aussi à la joie de vivre, sont représentées et traitées autour de la construction et de la destruction d’un liṅgam (terme sanscrit), figure anthropomorphique mâle ou femelle, parfois bisexuée, dessinée sur un support papier ou fabriquée pour incarner le mal, l’ennemi personnel ou celui de la religion tout entière. De longs et complexes rituels tantriques et exorcistiques sont joués et rejoués dans le théâtre rituel indo-tibétain, à travers danses, visualisations et constructions éphémères, dans lesquels il s’agit de détruire les ‘démons-obstacles’ qui s’attaquent à la personne, tout en laissant s’exhaler l’« âme » de ces démons, procédure qui renforce la puissance de l’officiant.
A travers des analyses illustrées de rituels bouddhistes funéraires et ancestraux au Népal, je voudrais montrer comment le traitement du liṅgam inverse les rapports philosophiques occidentaux entre Eros et Thanatos : dans l’optique bouddhiste tibétaine, tout se passe en effet comme si plaisir, amour, sexuation et mort, tous concepts incarnés à travers l’antiquité gréco-latine dans des figures allégoriques distinctes, étaient au contraire et depuis toujours fondamentalement indissociables dans les mondes indo-tibétains. J’illustre comment, dans ces derniers, c’est de la destruction d’un ennemi extérieur que provient la libération et la sortie de la souffrance. Cette destruction, qui est aussi délivrance d’une ‘âme’ suppose une lecture inversée des rapports entre Eros et Thanatos, si tant est que la libération du cycle des existences ne peut se produire qu’avec l’élimination-libération d’un liṅgam ‘bisexué’, annulant la séparation de l’être entre Eros comme tension et désir infinis, et Thanatos comme mort ou annihilation finale. L’élimination du liṅgam à travers les danses tantriques a pour but de rappeler aux hommes la condition ultime qui leur permet de reconnaître l’ignorance qui les enchaîne au rocher de Sisyphe.
Informations pratiques
Université de Paris, 45 rue des Saints Pères, Paris 6e, bât. Jacob, salle Mendel A
La séance sera accessible en direct web : lien zoom
Les séances du séminaire, ouvertes à tous, auront lieu simultanément en présentiel et en distanciel.
Découvrir le programme 2021-2022 du séminaire : Mort, perte, deuil 21_22_pdf